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  • Alain Marcoux

Présence autochtone sur le territoire de Sainte-Brigitte-de-Laval

Dernière mise à jour : 20 mars 2023


À travers les diverses recherches entreprises par la SHSBDL, sont apparus quelques signes de présence autochtone sur le territoire qu’occupe maintenant Sainte-Brigitte-de-Laval. Le sujet est vaste et complexe. Partout en Amérique, les spécialistes ne s’entendent pas tous sur l’occupation du territoire par les Premières Nations. Il nous apparaît quand même pertinent de présenter ce qui suit.


Dans un premier temps, c’est par l’entremise de Louis Lefebvre, l’auteur du passionnant ouvrage ‘’Le Sentier des Jésuites 1676-1703 ou Le maître-sentier des Innus-Montagnais de Québec au lac Saint-Jean’’ que nous avons pris connaissance de la présence d’autochtones (les Innus) sur le territoire de l’actuelle Sainte-Brigitte-de-Laval. Ce document présente le résultat des recherches réalisées par l’auteur pour établir ce sentier ‘’quasi mythique’’ entre Québec et le lac Saint-Jean dont on a souvent entendu parler.


Dans un second temps, c’est lors d’une rencontre avec des membres de la Société historique de Stoneham-et-Tewkesbury. Nous tentions alors de comprendre l’implantation de la ‘’Mission Saint-Martin’’. Cette mission aurait été établie sur le territoire de Sainte-Brigitte aux limites de la Seigneurie de Beaupré, tout près de Saint-Adolphe. La mission a disparu quelques décennies plus tard sans que nous connaissions clairement les raisons. En rencontrant les gens de la Société d’histoire de Stoneham-et-Tewkesbury, il est apparu des signes de présence autochtone, cette fois-ci, ceux des Wendats.



Les Innus-Montagnais

Louis Lefebvre nous a mis sur la piste des Innus Montagnais. Ces derniers font partie de la famille linguistique algonquienne. Ils peuplaient une grande partie du territoire au nord-est de l’Amérique jusqu’à certains endroits de la vallée du St-Laurent. Les archéologues notent des traces de présence humaine sur la côte nord du St-Laurent depuis 8 000 ans et 3 500 ans à l’intérieur des terres. On précise que ce peuplement humain peut être attribué spécifiquement à des Innus, il y 1 800 ans. Leur mode de vie repose sur le nomadisme, la chasse et la pêche.


Au moment du contact avec les européens, les Innus son effectivement bien présents. Pour illustrer ce fait, on estime que quand Champlain nomme Québec en juillet 1608, on dit qu’il arriva au milieu d’un regroupement estival de 1 500 autochtones, principalement des Innus. Les autochtones sont établis alors à Québec et tout autour, Sillery, Lévis, Rivière St-Charles, Baie de Beauport, etc… C’est la saison d’abondance, on y chasse les oiseaux migrateurs, on y pêche beaucoup, notamment l’anguille. C’était le moment de festivités, de mariages, de préparations d’expéditions guerrières contre des Iroquois.


Louis Lefebvre nous parle d’une coutume qu’il a découvert en faisant la recension d’ouvrages sur son sujet de prédilection. Il s’avère qu’un ouvrage publié en 1977 par Thomas-Edmond Giroux traite lui aussi du fameux sentier des Jésuites et que l’on peut associer Sainte-Brigitte aux Innus. Dans son ouvrage ‘’De Québec au Lac St-Jean’’, ce dernier relate une coutume qui révèle la présence des Innus à Ste-Brigitte. Il s’agit de la ‘’Corvée des rois’’ qui consiste pour les canadiens- français, à vouloir se procurer du poisson en grande quantité et qualité pour aider à passer à travers les 40 jours de carême où il était interdit de manger de la viande. Thomas-Edmond Giroux indique que c’est sous les directives des guides autochtones, qu’on emprunte la vieille piste de raquette montagnaise (innue) qui longe la rivière Montmorency puis la rivière des Neiges jusqu’au lac du même nom. Les Canadiens français revenaient dans leurs foyers chargés d’énorme quantité de poissons succulents pour surmonter les difficultés du carême. On appelle cette piste entre Beauport et Lac des Neiges, le chemin de Québec ou encore la vieille piste montagnaise.


Les Wendats-Hurons


Contrairement aux Innus, les Wendats font partie de la famille linguistique iroquoienne. Ils sont sédentaires et s’adonnent à l’agriculture. On constate alors en prenant connaissance des documents s’intéressant au sujet de l’utilisation du territoire par les Wendats que ceux-ci fréquentaient de grands pans de la grande région au nord de Québec. C’est grâce au travail de Frank G Speck qui s’est penché sur l’occupation du territoire et du grand chef Nicolas Vincent ainsi que de nombreuses autres personnes que l’on peut constater la présence de Wendats à Ste-Brigitte.

Une des cartes présentées dans le document réalisé par Jean Tanguay ‘’ La liberté d’errer et de vaquer : Les Hurons de Lorette et l’occupation du territoire, XVII-XIX siècles’’ illustre à une période donnée le partage d’une partie du territoire entre quelques familles wendates. On constate alors que c’est la famille Gros-Louis qui utilise le territoire autour de la Montmorency.



À ce sujet, il faut absolument présenter la carte qu’aurait réalisé le grand chef Nicolas Vincent sur une écorce de bouleau sur laquelle ce dernier aurait fait la cartographie des lieux utilisés par les Wendats. Sur la carte, on constate que la rivière Montmorency se nomme Kahndaoochaoyi Lahandawa. Par contre, si on consulte le document Toponymie des Hurons-Wendats produit pas la Commission de toponymie du Québec, on attribue le terme Kahndaoochaoy à ‘’Neiges’’ (ce qui porte à penser qu’il y avait peut-être un seul nom pour la rivière des neiges et la rivière Montmorency). Kahndaoochaoyi signifierait‘’ ’froid gelé’’ ou ‘’apporter la maladie’. Le mot Lahandawa lui, signifie rivière.


Conclusion

À partir des documents étudiés, iI ne semble faire aucun doute que les Innus et les Wendats ont parcouru amplement le territoire que devint Sainte-Brigitte. Beaucoup d’autres éléments auraient pu être abordés dans cet article. On peut penser particulièrement à la manière dont s’est organisé le partage du territoire entre Innus et Wendats lorsque ces derniers sont arrivés dans la région de Québec. Il nous est apparu aussi en réalisant nos recherches, l’immense dégât patrimonial qu’a causé la colonisation de ce pays. Par moment, malheureusement, nous nous sommes trouvés envahis par un sentiment de pertes inestimables. Finalement, si nous avons pu extirper quelques éléments fragiles de l’histoire, nous nous sommes rendu compte que c’est parce que des personnes hors de l’ordinaire ont consacré énormément d’efforts pour que subsiste une telle mémoire. Il faut les en remercier.


Références :

LEFEBVRE, Louis. Le Sentier des Jésuites 1676-1703 : Le maître-sentier des Innus-Montagnais de Québec au lac Saint-Jean. Collection Société d’histoire de Stoneham-Tewkesbury. Les Éditions Histoire Québec. 2008.

DELÂGE, Denys. Les Innus, un peuple à travers l’histoire (première partie). Les cahiers des dix. Numéro 73, 2019, p.1-45. Explorer la mémoire et l’histoire. Les Éditions La Liberté. 2019.

GIROUX, Thomas-Edmond. De Québec au lac St-Jean ou Les Sentiers des Laurentides, Sentiers des Amérindiens, Sentier des Jésuites (1676-1703). Publication no 32 de La Société historique du Saguenay. 1977.

SPECK, Frank G. Huron Hunting Territories in Quebec. Indian notes, vol IV, no 1. 1927

TANGUAY, Jean. La liberté d’errer et de vaquer : Les Hurons de Lorette et l’occupation du territoire, XVIIe-XIXesiècles. Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures de l’Université Laval. Département d’histoire. Faculté des lettres. 1998.

BOUCHETTE, Map of the Northern Bank of the St. Lawrence from the Riv. St-Maurice to the R. Saguenay reduced from a Plan by an Huron chief by Mr Bouchette, inclosed in Coll. Cockburn’s Report 12th September 1827. The National Archives of the UK, Londres. Public Record Office.

COMMISSION DE TOPONYMIE DU QUÉBEC. La Toponymie des Hurons-Wendats. Dossiers toponymiques, 28. Gouvernement du Québec 2001.

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